Description
De 2019 à 2023, Georges Pacheco, photographe, et Estelle Granet, autrice, ont sillonné la Sarthe et la Touraine à la rencontre des Duville, une grande famille de Voyageurs manouches présente depuis longtemps sur ces territoires. Un périple artistique qui les a menés sur les traces des descendants d’un couple emblématique, Émile dit Didi et Eugénie dite Canette.
Les Duville, ainsi que les Gaisne, Dourlet et Helfrich qui leur sont apparentés, sont encore aujourd'hui représentatifs d'un mode de vie particulier, celui des Manouches dits buissonniers qui se déplacent encore de village en village et s'arrêtent souvent en dehors des aires d'accueil, dans des sites connus de longue date et connectés à leur histoire familiale.
Mais, ce mode de vie est aujourd’hui en mutation. L’abandon progressif des chevaux puis des roulottes, au profit de caravanes, a modifié la façon de voyager et d’être ensemble. Les différentes branches de la famille se rencontrent moins souvent, les modes de communication ont changé et les anciens font souvent état de difficultés à transmettre oralement l'histoire familiale. C’est ce qui a incité Georges Pacheco et Estelle Granet à s'engager dans cette aventure artistique consistant à recomposer avec la famille une mémoire à partager et à transmettre.
Afin de mener à bien ce projet, ils ont transformé une caravane en studio photographique ambulant. Parcourant terrains d’accueil et lieux improvisés de campement, ils ont invité les descendants de Didi et Canette à poser pour un portrait individuel, à confier témoignages et souvenirs, à échanger autour de leurs albums familiaux. Cette caravane a constitué une passerelle, un lieu d’échange et de création, un espace à la fois familier et étranger qui attirait et rapprochait. Autour, les conversations se nouaient. Par la fenêtre ou la porte ouverte, chacun pouvait jeter un œil à l’intérieur, assister à la séance photographique, partager des impressions, raconter des histoires, s’approprier la démarche.
MĀNOUCHES se veut une mise en images et en mots du passé et du présent de cette lignée de Voyageurs emblématique de la Sarthe et des Pays de la Loire.
Un voyage au coeur des représentations
Pendant ces quatre années, plus de quatre-cents personnes ont été photographiées devant un fond neutre identique pour tous, un espace dans lequel chacun pouvait révéler quelque chose de sa singularité. Ce dispositif prend aussi à contrepied les portraits anthropométriques autrefois réalisés à des fins de contrôle et de fichage, en permettant aux personnes de se réapproprier l’acte d’être photographiées, de se donner à voir telles qu’elles s’envisagent et non pas de façon contrainte. Autrement dit, se représenter librement.
Cette question de la représentation de soi est centrale dans l'approche artistique de Georges Pacheco. Tous ses travaux sont orientés par la recherche de la bonne démarche, c'est-à-dire du protocole photographique le plus juste pour représenter l’autre ou lui permettre de se représenter. Photographier quelqu'un ou être photographié sont pour lui deux actes engageants, deux moments énigmatiques et fascinants dont on ne connait jamais l’aboutissement à l’avance. Que ce soit sur un mode documentaire ou plus expérimental, il n'a de cesse de questionner ce qui se joue véritablement dans la fragilité de ce face à face quasiment immuable depuis l’invention de la photographie. Quels sont les enjeux intérieurs pour chacun des protagonistes ? Quelle part de chacun d’eux se révèle en définitive dans le portrait ?
Une saga familiale en mouvement
Parallèlement, Estelle Granet a longuement recueilli ce que les membres de la famille acceptaient de confier : des souvenirs plus ou moins récents, des réflexions sur la vie qui change, des bribes du passé transmises de génération en génération mais qui se racontent aujourd’hui de façon souvent décousue et dessinent une mémoire en pointillés. Des dizaines d’heures d’entretien ont été enregistrées, que sont venues compléter des recherches aux archives départementales de la Sarthe, d’Indre-et-Loire, de Maine-et-Loire... En suscitant de nouvelles interrogations, en réveillant d’autres souvenirs, en précisant certains récits, ces documents devenaient à leur tour le support d’échanges souvent intergénérationnels. Au fil des rencontres avec les différentes branches de la famille, une narration collective s’esquissait peu à peu, avec ses élans et ses ellipses, ses moments-clés, ses personnages charnières et ses mystères.
Il ne restait qu’à tisser ensemble ces fragments, sans s’interdire de réinventer ce qui s’est perdu, d’imaginer ce qu’on ne saura jamais, pour dessiner une histoire en forme d’épopée. Celle d’une lignée de Voyageurs partie de l’est de la France à la fin du XVIIIe siècle pour se déplacer progressivement vers le centre et l’ouest où elle est aujourd’hui fortement implantée. Près de deux siècles séparent Jean-Baptiste, dentiste ambulant mort en 1855 dans l’Aube, et Levy qui, sept générations plus tard, dans la Sarthe, s’interroge sur sa vie, son avenir et ce que signifie, pour lui, être Manouche aujourd’hui. Entre eux, se déploie toute une galerie de personnages qui, chacun leur tour, incarnent le parcours de cette famille. Un parcours singulier qui, sans cesse, croise et répond à la grande Histoire.
Nous remercions tout particulièrement les archives départementales de la Sarthe, d'Indre-et-Loire, de Maine-et-Loire, du Loir-et-Cher et de Vendée, à travers leur direction et leurs collaborateurs. Leur accompagnement nous a permis d'accéder aux documents concernant la famille Duville, et de les utiliser pour l'ouvrage et les expositions à venir.
Reprendre le temps de son image
"Ce récit est celui que les membres d’une famille ont choisi de partager avec une écrivaine et un photographe. Il est celui d’une quête dans les archives à la recherche des traces, parfois éclairantes, parfois insuffisantes, que les souvenirs et récits familiaux venaient confirmer ou infirmer. L’histoire écrite à plusieurs permet de compléter la description et la compréhension des mondes manouches en France, à la suite de témoins et écrivains comme Coucou Doerr et Lick, de passeurs comme le Père Joseph Valet ou de chercheurs comme Patrick Williams. Ce récit est aussi celui qui a pris forme dans un studio mobile, équipé d’un simple fond noir qui semble absorber la rumeur du monde. Dans cet espace apaisé, le temps passe différemment, les corps et les visages se déploient, ils posent un regard affirmé sur le photographe qui les regarde mais aussi sur le monde qui les entoure. Image après image, ils élaborent les contours d’un nouvel album de famille. [...]
L’histoire des descendants de Didi et Canette rappelle, dans les interstices du récit et des portraits, l’inscription historique profonde et ancienne dans le pays de France. Tous les visages photographiés, les lieux cités et les récits de vie racontés dans ce livre évoquent les ancrages multiples d’un univers social entrelacé à celui des autres composantes de la société française."
Extrait de la préface d'Ilsen About, Historien spécialiste des mondes tsiganes, chargé de recherches au CNRS
Qui sont les auteurs ?
Georges Pacheco vit près du Mans. Diplômé de l’Ecole Nationale Supérieure de la Photographie d’Arles en 2012 après l’obtention d’un D.E.A en Psychologie de l’Art à l’Université Paris X, il se consacre, depuis une vingtaine d’années, à scruter en profondeur les conditions humaines. Adaptant ses approches et ses dispositifs aux différentes problématiques qu’il traite, il essaye de comprendre les processus de représentation au travers du portrait photographique et de poser son regard engagé sur le genre humain. Les questions de la représentation de soi, des mécanismes intérieurs qui sous-tendent cette représentation, le rapport entre photographe et photographié(e) et la volonté de mener une réflexion sur l’acte photographique sont au centre de son travail d’auteur. Particulièrement sensible à la qualité des relations qu’il entretient avec ceux qu’il photographie, Georges Pacheco tente de révéler, à travers une approche intimiste du portrait, les contours de l’existence et la profondeur de l’être. Son travail photographique, présenté en France comme à l’étranger dans de nombreuses galeries et festivals renommés, a été récompensé à plusieurs reprises par des Prix nationaux et internationaux. Une dizaine d’ouvrages retraçant son univers artistique ont également été publiés. Site : www.georgespacheco.com
Devenue autrice après des études d'anthropologie, Estelle Granet situe son travail à la frontière entre la fiction et le documentaire. Elle aime triturer le réel pour en faire une matière artistique et littéraire. Son travail d'écriture explore l'humain et son intimité. Elle cherche et tourne autour de la façon dont nous composons et recomposons sans cesse nos identités, en lien avec les autres. La façon dont notre histoire, nos ancêtres, nos fantômes nous pétrissent et nous modèlent. La façon dont notre mémoire travaille, la quête de nos racines, la réinvention permanente de nos origines... Elle cherche, dans l'écrit, une porte vers l'autre, une façon de transformer le quotidien en un terrain de rencontre et d'exploration d'autres possibles. Elle a publié, entre autres, "Sept fois presque rien", recueil de nouvelles récompensé par le Prix de la nouvelle d'Angers et "l'Écho d'un instant", roman paru aux éditions Le Chant des Voyelles. Estelle Granet a été la lauréate de la résidence d'écriture 2019/2020 de la Ville du Mans. Site : www.estellegranet.com
Utilisation des fonds
Les fonds collectés permettront de financer une partie des coûts d'impression du livre
MĀNOUCHES - Un voyage avec les descendants de Didi et Canette Duville
Un livre d'art édité par Images Plurielles
Photographies : Georges Pacheco
Texte : Estelle Granet
Préface : Ilsen About, historien spécialiste des mondes tsiganes, chercheur au CNRS
Format 20x28 cm, 276 pages
Couverture toilée, marquage à chaud
230 photographies en couleur et en noir & blanc
80 pages de texte illustré par des documents d'archive
Prix public : 43 €
Sortie du livre le 17 mai 2024
Budget de production pour 1300 exemplaires : 28 000 €.
MĀNOUCHES a reçu, pour l'instant, le soutien du ministère de la Culture, une aide à la création de la Région des Pays de la Loire, le soutien de la Ville de Tours, de la Ville du Mans, du SMGV (Syndicat Mixte pour le stationnement des Gens du Voyage) et de la FNASAT (Fédération nationale des associations solidaires d'action avec les Tsiganes et les Gens du voyage).
Le livre MĀNOUCHES sera présenté en avant-première le 17 mai 2024, à l'occasion du vernissage d'une grande exposition, qui sera visible au château de Tours du 17 mai au 6 octobre 2024.
Votre soutien nous est très précieux pour réaliser le plus bel ouvrage possible et assurer un tirage de 1300 exemplaires.
Nous vous remercions de votre engagement à nos côtés.
Georges Pacheco & Estelle Granet